Témoins majestueux d’un savoir-faire métallurgique ancestral, les hauts fourneaux de Békuy se dressent dans la forêt classée de Maro, à une vingtaine de kilomètres de la commune de Békuy. Ce site exceptionnel, riche d’histoire et de spiritualité, mérite une reconnaissance à la hauteur de son importance patrimoniale. Classé patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2019.

À quelques encablures de l’axe Bobo-Dioulasso – Dédougou (RN10), en pleine forêt classée de Maro, le visiteur curieux découvre un paysage aussi fascinant que surprenant. Surgissant de la végétation, des structures de terre cuite hautes de 5 à 11 mètres s’imposent au regard : ce sont les hauts fourneaux de Békuy. Érigés sur plusieurs hectares, entourés de scories ces résidus massifs issus de la réduction du minerai de fer, ils témoignent d’une activité métallurgique intense, conduite il y a plusieurs siècles par des forgerons maîtrisant des techniques d’une grande sophistication. Aujourd’hui encore, ce lieu attire les populations pour des rites traditionnels d’adoration, preuve de sa vitalité culturelle et spirituelle.

Une architecture imposante dans un écrin naturel
Le site frappe d’abord par sa dimension spectaculaire. Dispersés sur un vaste espace, les fourneaux s’élèvent en colonnes de terre solidifiée, certaines atteignant près de 11 mètres de haut. À leurs pieds s’amoncellent des scories, noires et denses, témoins des opérations métallurgiques d’autrefois. Ce paysage, à la fois rude et harmonieux, révèle un passé industriel organisé, porté par une logique de production à grande échelle, bien avant l’introduction des technologies modernes.

Des forgerons au cœur d’un savoir-faire technique ancestral
Ce patrimoine n’est pas seulement monumental : il est aussi technique. Les hauts fourneaux étaient construits et utilisés par des forgerons détenteurs de secrets de fabrication transmis oralement. À partir de minerai brut extrait localement, ces artisans savaient produire du fer pour fabriquer des outils agricoles, des armes ou encore des objets de culte. Ce travail, mêlant maîtrise du feu, de l’argile et du vent, exigeait une grande précision et une connaissance fine des matériaux.

Un lieu toujours vivant dans les pratiques locales
Au fil des siècles, le site a conservé son importance auprès des habitants de Békuy. Encore aujourd’hui, les populations locales s’y rendent pour accomplir des rituels, faire des offrandes et prier les ancêtres. Le lieu est perçu comme sacré, protégé par des forces invisibles. Cette charge spirituelle renforce sa valeur patrimoniale, en faisant un espace de mémoire vivante, et non une simple ruine.

Un patrimoine vulnérable en attente de reconnaissance
Malgré sa richesse culturelle, le site reste peu connu et peu valorisé. L’accès y est passable, et aucun aménagement touristique ou scientifique n’est visible. Ce relatif isolement protège, certes, les fourneaux de la dégradation immédiate, mais expose aussi le site à une lente érosion, voire à l’oubli. Des démarches en faveur de sa reconnaissance nationale, voire internationale, seraient salutaires pour garantir sa conservation durable.

Une mémoire forgée dans le feu et la terre
Les hauts fourneaux de Békuy sont bien plus qu’un amas de terre séchée : ils racontent l’ingéniosité des anciens, la place centrale des forgerons dans les sociétés traditionnelles et la richesse technologique du Burkina Faso précolonial. En les protégeant et en les faisant connaître, nous valorisons un pan fondamental de notre identité culturelle. Ce site mérite d’être inscrit au patrimoine, étudié, et visité comme l’un des témoignages majeurs de l’Afrique métallurgique ancienne.
✍️ Parfait Fabrice SAWADOGO