jeu 3 juillet 2025

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Redonner ses lettres de noblesse au peuple LYELA : une identité à reconnaître et à respecter

Dans les méandres de l’histoire et des classifications coloniales, certaines identités culturelles ont été mal nommées, mal comprises, voire effacées. C’est le cas du peuple LYELA, souvent désigné à tort sous le terme « Gourounsi ». Pourtant, les LYELA possèdent une histoire, une langue, une organisation sociale et une identité propre, bien ancrées dans le cœur du Burkina Faso.

Masque Gourounsi de Zawara commune du Sanguié

Le terme « Gourounsi », hérité d’un usage colonial approximatif, regroupe de manière imprécise plusieurs peuples du centre-ouest du Burkina Faso, chacun avec sa langue, sa culture et ses spécificités. Parmi eux, les LYELA forment un groupe distinct. Ils revendiquent aujourd’hui la reconnaissance de leur véritable nom : LYELA (au singulier comme au pluriel), et rejettent fermement l’étiquette réductrice de « Gourounsi ».

Masque gourounsi

LYELA et non Gourounsi : une précision historique

La langue LYELÉ est au cœur de cette identité. Parler LYELÉ, c’est se connecter à une mémoire ancestrale, à une manière de voir le monde et à un système de pensée. Cette langue, qui appartient au groupe des langues voltaïques, est parlée dans plusieurs localités du centre-ouest, notamment dans les régions aujourd’hui connues sous les noms de Réo et de Koudougou. Toutefois, dans la langue LYELÉ, ces villes portent leurs véritables noms : DJÔ pour Réo et NANDO pour Koudougou.

Le groupe LYOLO : une organisation identitaire forte

Les membres du peuple LYELA s’identifient comme appartenant au groupe LYOLO. Ce terme désigne l’ensemble des personnes issues de cette culture et partageant les mêmes valeurs, traditions et codes sociaux. Le LYOLO n’est pas seulement une communauté géographique : c’est un espace culturel et spirituel tissé par l’histoire, la parenté, la solidarité et le lien à la terre.

Masque Gourounsi de SAO . Département de TCHERIBA province dU MOUHOUN

Des noms porteurs de sens : BA et KAN

Dans la culture LYELA, les noms de famille sont des marqueurs d’identité sexuée, enracinés dans les codes de la société. Ainsi, « BA » est la racine réservée aux garçons, tandis que « KAN » est celle des filles. Ces suffixes ne sont pas de simples conventions : ils expriment une appartenance, une histoire familiale et une filiation directe avec les ancêtres. On ne nomme pas un enfant LYELA à la légère ; son nom est à la fois une bénédiction et une assignation sociale.

Une mémoire à restaurer, une fierté à transmettre

Aujourd’hui, alors que le Burkina Faso cherche à valoriser toutes ses composantes culturelles dans leur authenticité, il est crucial de reconnaître pleinement les LYELA pour ce qu’ils sont : un peuple fier, porteur d’une histoire riche, d’une langue structurée et d’une organisation sociale élaborée. Dépasser les appellations génériques héritées du passé, c’est faire acte de justice culturelle.

Revaloriser le LYELÉ, enseigner la vraie toponymie (DJÔ, NANDO), et surtout reconnaître la richesse du LYOLO dans le tissu national, c’est ouvrir une voie vers une meilleure compréhension de notre diversité. C’est aussi permettre aux jeunes générations LYELA de grandir dans la dignité de leur nom, de leur langue et de leur histoire.

Reconnaître les LYELA, c’est reconnaître le Burkina Faso dans sa pluralité

En redonnant aux LYELA leur juste place dans le récit national, il ne s’agit pas seulement de réparer une erreur historique ou de corriger un mot. Il s’agit de reconnaître un peuple dans toute sa dignité, son intelligence culturelle et son apport à la nation. Face aux défis de la cohésion sociale, de la transmission des savoirs et de la construction identitaire, il est urgent de nommer juste, de transmettre vrai et de valoriser chaque héritage.

Le LYELÉ n’est pas une langue du passé, le LYOLO n’est pas une société figée, et les LYELA ne sont pas un vestige. Ils sont vivants, debout, porteurs d’une mémoire en mouvement. Et leur reconnaissance pleine et entière est une richesse pour l’avenir du Burkina Faso.

✍️ Parfait Fabrice SAWADOGO (Journaliste culturel)

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